© Jean Louis CHATELAIN
     
     
C   Caravelle
   

« Tout là haut dans le ciel, la blanche Caravelle … »

Ces paroles de chanson Française des années soixante en disent beaucoup sur le mythe que porte alors cet avion. C’est par lui que les Français, qui se remettent lentement de la guerre, redécouvrent qu’ils ont une industrie aéronautique civile. Quelle audace : deux réacteurs installés tout à l’arrière du fuselage, on a jamais vu ça ! Mis entre parenthèses l’épisode des premiers Comet anglais, qui avaient vocation au long courrier, « la Caravelle » est le premier avion de transport moyen courrier à réaction. Il sort des usines de Sud Aviation à Toulouse avant que les Américains, que l’on accusera, sans doute à tort, de plagiat, ne produisent leurs DC9. On se déplace en famille le dimanche pour aller le voir décoller depuis les terrasses d’Orly, de Genève-Cointrin (ainsi votre serviteur). A le comparer aux avions « à hélices » il donne l’impression de monter à la verticale…

La force évocatrice du mot caravelle n’est rien moins que celle de la découverte de l’Amérique par Colomb sur la Santa Maria! Le mot vient du Portugais Caravela, qui, au quinzième et au seizième siècle, qualifie un navire rapide et de petit tonnage, définition parfaitement adaptée à ce que représente alors la Caravelle dans ce qu’elle apporte au transport aérien.

     
   
    Caravelle F-BHRA - "Alsace"
     
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    Chicago
   

L'avion, ce n'est pas une fin, c'est un moyen…
 Mais, par l'avion, on quitte les villes et leurs comptables…

Antoine de St-Exupery in « Terre des hommes »

 

    Cette année 1944 annonce la fin de la deuxième guerre mondiale et la victoire des alliés. Après le débarquement du 6 juin 1944 et la lente reconquête des territoires occupés, il faudra attendre mai de l’année suivante pour graver le mot fin.
Néanmoins, face à ce qui promet d’être un bon en avant du transport aérien civil, sitôt les hostilités terminées, les états occidentaux mettent en œuvre un processus visant à organiser pacifiquement le futur système aéronautique mondial, et à l’harmoniser.
Le 7 décembre 1944, trois ans jour pour jour après la funeste attaque de Pearl Harbor par l’armée japonaise et ses avion suicides, cinquante‑deux états signaient la convention de Chicago.
Trois quarts de siècles plus tard, on se rend compte que cette convention est un monument dans l’histoire de l’aviation, pour ne pas dire de l’humanité.

 

   

 

Le texte original est rédigé en langue anglaise. Depuis, deux protocoles ont consacré la rédaction quadrilingue de la convention. Un premier, signé à Buenos Aires en 1968, et le second, signé à Montréal en 1977.


Chacun des textes en langue anglaise, française, espagnole ou russe fait foi.

Cette rédaction quadrilingue dénote sans doute un pacte d’équilibre géopolitique. En ce sens il est permis de penser qu’un troisième protocole viendra probablement transformer la convention pour une convention pentalingue en y ajoutant la version chinoise.


Le quadrilinguisme est aussi dans l’esprit universaliste de la convention.

   

 

Le préambule est magnifique de bonne volonté pacifique et universaliste :


« CONSIDERANT que Ie développement futur de I‘aviation civile internationale peut grandement aider à créer et à préserver entre les nations et les peuples du monde I'amitié et la compréhension, alors que tout abus qui en serait fait peut devenir une menace pour la sécurité générale,
CONSIDERANT qu’il est désirable d'éviter toute mésentente entre les nations et les peuples et de promouvoir entre eux la coopération dont dépend la paix du monde »

Puis vient la finalité de cette convention, qui repose sur trois piliers :

  • La sécurité des vols
  • La libre et juste concurrence
  • La viabilité économique du transport aérien

« afin que I'aviation civile internationale puisse se développer d'une manière sûre et ordonnée et que les services internationaux de transport aérien puissent être établis sur la base de I'égalité des chances et exploités d'une manière saine et économique. »

L’article 44 reprend, à propos de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), organisme créé par la convention, ce noble objectif universaliste:

« répondre aux besoins des peuples du monde en matière de transport aérien sûr, régulier, efficace et économique »

Cette convention a été un succès planétaire ; C’est aujourd’hui 193 états qui en sont partie.
Le droit de survol par un aéronef civil en service non régulier est un principe de base de cette convention. Pour les services réguliers, il faut un accord spécifique. Les aéronefs sans pilote sont exclus, sauf autorisation spéciale.
En cette période de pandémie il est remarquable de trouver une clause traitant de la prévention de la propagation des maladies contagieuses (article 14).


C’est tout le génie de la convention de Chicago que de promouvoir des normes et pratiques recommandées, qui seront, pour la plupart, suivies d’effet dans les règlementations nationales… Tout en préservant la souveraineté absolue et exclusive de chaque état sur l’espace aérien au‑dessus de son territoire (article premier de la convention).


Pourquoi et comment ?

 

   

Eh bien tout simplement parce que dans les termes de la convention, les états s’obligent, soit à mettre en œuvre les normes dans leur règlementation nationale, soit notifier une différence, au sus de tout le monde ! Ces différences sont tout aussi publiques que les normes elles-mêmes. Et du coup, de peur de se mettre au banc des relations internationales, il y en a très peu, et les états mettent en application les annexes à la convention de Chicago dans leur règlementation nationale. L’organisation de l’aviation civile internationale (OACI) qui est créée par la convention de Chicago n’a cessé d’œuvrer depuis sa création pour que le transport aérien international soit devenu ce qu’il est : Le moyen de transport le plus sûr du monde (après la marche à pied ?!).
C’est un énorme accomplissement. En particulier dans les domaines suivants :
Les critères d’obtention des licences des personnels navigants sont harmonisés (annexe 1 à la convention)… Et, pour avoir navigué dans très nombreuses et différentes compagnies aériennes de par le monde, durant mes années comme instructeur chez Airbus, je puis vous rassurer que ça marche ! Le niveau de compétence est cohérent.
Les règles de l’air et de circulation aérienne sont harmonisées (annexe 2)
Les Opérations aériennes sont harmonisées (annexes 6)… La France, qui avait notifié une différence pour ne pas rendre obligatoire l’avertisseur de proximité du sol (GPWS ), outil conçu pour prévenir les accidents de type CFIT , est vite revenu dans le rang après l’accident du Mt Ste-Odile, dans les Vosges, en 1992.
L’annexe 8 harmonise les règles pour la délivrance de  certificats de navigabilité et le suivi et maintien de la navigabilité.
Les procédures de circulation aériennes, les communications, l’infrastructure des aéroports, ont été standardisées et harmonisées de par le monde grâce à différentes normes produites dans autant d’annexes.
L’enquête sur les accidents a été formalisée, pour déterminer les compétences des différents états, et pour privilégier la recherche des causes dans un but de prévention et non dans un but de sanction administrative ou judiciaire.
Les questions environnementales (en particulier le bruit), de sûreté, de transport de matières dangereuses, de gestion de la sécurité (un des plus récents concepts) ont toutes été mises en œuvre dans le monde entier. L’analyse systématique des paramètres de vol, rendu obligatoire, a permis une amélioration spectaculaire de la sécurité des vols, malgré un contexte d’expansion ahurissante.


Ground Proximity Warning System. Le système génère une puissante alarme sonore au cockpit en cas de rapprochement dangereux avec le sol.

Controlled Flight into Terrain : C’est une typologie d’accident qui signifie que le crash est arrivé par erreur de navigation alors que les systèmes de bord fonctionnent. C’est, avec la perte de contrôle en vol, le type d’accident le plus meurtrier.

   

Que dire des autres organisations internationales.


On aimerait voir un tel accomplissement dans le domaine de la santé. L’OMS nous fait bien voir, en cette époque de pandémie, son impuissance à mettre en œuvre une réglementation internationale. Les recommandations de l’OMS restent des vœux pieux qui ne sont pas systématiquement traduits dans les règlementations des états.


Une harmonisation des règles du travail ? Que nenni, le monde ne dispose que d’un bureau international du travail (BIT, espèce de secrétariat permanent de l’organisation internationale du travail, OIT), qui produit un rapport de temps en temps, deux mille sept‑cents fonctionnaires de plus de cent cinquante pays y travaillent à Genève! Quarante bureaux dans le monde ! Le travail des enfants ? A quoi a servi le BIT ? Que font les nations de l’ONU ? Ah oui, il y a l’UNICEF, un gentil club pacifiste.

 

   

Les nobles objectifs de l’OIT :

 


Efficacité ?: Inexistante.

 

   

Une harmonisation des règles du commerce ? Que oui, il y a l’OMC, qui fait la promotion du commerce sans entraves, du libre-échange mondial effréné, que d’aucuns appellent ultra‑libéralisme, sauf pour certains états comme la Chine ou les USA qui avancent avec leur protectionnisme masqué…

Ce système est anti écologique, avec ses circuits longs. Dans un contexte de disparité des règles du travail et de la protection sociale, ce système est déloyal et ne peut que conduire aux délocalisations, qui créent ces circuits longs et paupérisent les masses laborieuses occidentales.


La convention a été améliorée et modifiée au cours des années. La neuvième et dernière révision de la convention de Chicago date de 2006.


Oui, la convention de Chicago est un monument dans l’histoire des relations internationales. Elle fait la fierté du transport aérien international.

   

« J’adore Chicago, c’est le pouls e l’Amérique »
Sarah Bernhardt

La Clusaz, avril 2020

   

© Jean Louis Chatelain

 

   
  Cockpit
   

Dans la vieille Angleterre c’était le lieu où se déroulaient les combats de coqs. C’est du même mot que le théâtre Shakespearien baptisa la scène. Aujourd’hui ce vocable est universellement utilisé pour désigner le poste de pilotage. Cette idée d’un endroit un peu sanglant a transité par la marine Britannique, laquelle, depuis le 17e siècle, a pris coutume de nommer « cockpit » un espace à l’arrière du bateau, où on déposait les blessés. Cet espace, en fait, était plus couramment utilisé par les jeunes officiers, et se trouvait en général proche de l’homme de barre.

Les milieux aéronautiques anglophones ont très tôt baptisé le poste de pilotage des avions de ce vocable « cockpit ». S’y ajoutait aussi l’idée d’une certaine exiguïté, bien réelle.


Aujourd’hui les équipages sont dans un environnement climatisé, à l’ergonomie étudiée (même s’il y a encore de la marge de progression !), avec un niveau de bruit raisonnable permettant de converser, en croisière, sans l’aide du système interphone. Sur les avions Airbus, grâce au mini manche latéral, il y a même une tablette rétractable utilisable comme petit bureau et améliorant sérieusement le confort du repas.

Et les pilotes sont assis…

Ceci semble évident de nos jours mais ne l’a pas toujours été. Ainsi les frères Wright ont-ils réalisés les premiers vols pilotés en position couchée. Cette position couchée vers l’avant a été ensuite abandonnée pour la position debout ! (Il y aura plus tard des positions « couché sur le dos », sur des prototypes, et pour des essais en vol). Puis, la durée des vols est passée rapidement de l’ordre de la minute à une heure et plus… Et naturellement furent introduits des sièges de pilotage plus ou moins carénés. Les pilotes avaient toujours la tête à l’air libre, ce qui les exposait aux projections, peu ragoûtantes, d’huile du moteur, mais leur permettait d’être dans l’élément, de conforter leur sens de l’air et d’apprécier plus ou mois la vitesse de l’avion. Leurs capteurs sensoriels les y aidaient par la perception du bruit et de la pression dynamique de l’air.

Puis la vitesse des avions augmenta. Et la recherche d’une moindre traînée aérodynamique, la conception d’instruments de bord adéquats, a conduit au cockpit fermé. C’est peu de dire que les premiers pilotes n’y étaient pas favorables ! Ils avaient l’impression plus ou moins bien exprimée d’y perdre les sens…. On retrouvera ces mêmes réticences à la mise en ligne des avions modernes qui, de fait, ont privilégié la vue au détriment des autres sens du pilote, en particulier du toucher.

Au début de l’aviation, les commandes de gouverne de profondeur et de gauchissement étaient séparées, ce qui amenait le pilote à lâcher la commande du moteur, situation à risques vues les timoneries de l’époque. Un Français, Esnault Pelterie, inventa alors le manche à balai.

Dans le jargon des équipages Français, il est courant de parler de la terrasse. C’est bien sûr faire passer l’idée par laquelle les pilotes disposent d’une vue panoramique. Et il faut reconnaître que les pilotes ont la meilleure vue à bord. Ainsi l’hôtesse apportera-t-elle un café « à la terrasse ».

     
   
    Jean Louis au cockpit de l'A380, avec Hughes Van Der Strichen pilote d'essai expérimental chez Airbus
     
 
 
     
 
 
 
 
     
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